Régulièrement, nos membres nous interrogent si le congé déjà accordé avant la fin de la relation de travail assortie d’une dispense de travail devait être pris en compte ou non pour déterminer l’indemnité de congé non pris. Cette question trouve en effet sa source dans deux dispositions du Code du travail. La première, à savoir l’article L. 233-12. alinéa 3 dispose que : « si après la résiliation du contrat de travail de la part soit de l’employeur soit du salarié, ce dernier quitte son emploi avant d’avoir joui de la totalité du congé qui lui est dû, l’indemnité correspondant au congé non encore pris lui est versé au moment de son départ, sans préjudice de ses droits au préavis de licenciement. » La seconde, l’article L. 233-18. prévoit que : « il est interdit au salarié de faire abandon du congé auquel il a droit, fût-ce même contre une indemnisation compensatoire, sauf accord des parties de remplacer le congé par une indemnité de compensation en cas de cessation de la relation de travail conformément aux dispositions de l’article L. 233-12. alinéa 3. »
A la FEDIL, nous avions pris l’option d’indiquer à nos membres que le congé déjà accordé devrait être décompté du congé total encore dû même si celui-ci se situait dans la période de dispense, mais qu’il n’existait pas de décision en la matière de sorte qu’en cas de procès du salarié contre l’employeur à ce sujet, le jugement définitif des juridictions du travail serait à exécuter.
Entretemps, la Cour d’appel s’est prononcée en date du 28 avril 2022 1 sur la question. Dans l’affaire à la base de cette décision, le salarié dont le contrat à durée déterminée venait à échéance le 14 mai 2020, a été dispensé de travail à partir du 22 janvier 2020. Or, avant d’être dispensé de travail, le salarié avait reçu l’accord de son employeur quant à des jours de congé posés pour la période du 24 décembre 2019 au 31 janvier 2020.
Devant les juridictions du travail, le salarié a demandé à se voir allouer le paiement d’indemnités pour congé non pris à hauteur de 5.645,64 euros, soit pour un total de 171,60 heures tel qu’il ressortait de la fiche de salaire du mois de mai 2020. La Cour d’appel a décidé que : « La dispense de travail accordée au salarié jusqu’au terme du contrat, suivant courrier du 22 janvier 2020, ne fait pas obstacle à la prise en considération du congé posé pour la période du 22 janvier au 31 janvier 2020. Il convient, en effet, de rappeler, à cet égard, que le contrat de travail à durée déterminée n’a pas pris fin à la suite d’un licenciement avec préavis, assorti d’une dispense de travail, mais à son terme contractuellement prévu. La question de l’incidence du principe découlant de l’article L. 124-9. (1), alinéa 2 du Code du travail, suivant lequel l’employeur ne saurait imposer au salarié de prendre son congé pendant la période de préavis, assortie d’une dispense de travail, ne se pose, dès lors, pas en l’espèce. »
La Cour d’appel a en conséquence procédé à la déduction de tous les jours de congé accordés depuis le 24 décembre 2019 – y compris ceux qui auraient dû être pris durant la dispense soit les jours de congé compris entre le 22 et le 31 janvier 2020 – du total des jours de congés restants. Ainsi, au lieu de 171,60 heures de congés réclamés, le salarié a obtenu 51,60 heures soit 1.7697,64 euros d’indemnités pour congé non pris.
Cette décision de la Cour d’appel confirme la position de la FEDIL en la matière en instaurant le principe selon lequel le congé déjà accordé avant la dispense de travail doit être déduit du total du congé restant. Il est évident et nous le rappelons que l’employeur ne doit pas forcer, voire imposer au salarié de prendre le congé durant la dispense, respectivement durant le préavis. Si tel avait été le cas, donc si l’employeur avait imposé le congé ou forcé le salarié à en prendre, la solution du litige aurait naturellement été différente.